L’orage

L’orage

Après de longues périodes de chaleur, il y avait toujours quelque nuage qui finissait par apparaître. Cotonneux et haut dans le ciel bleu de l’été, avec ses volutes, il était annonciateur de pluie pour le lendemain, voire le sur lendemain. Déjà, il pouvait courir sur la plaine brûlante la caresse d’un air plus frais, un air vibrant que nous adorions respirer. Il avait une odeur toute particulière. Une odeur profonde, chaude, chargée des parfums de la forêt. A son parfum on sentait qu’il avait fait sa promenade sous les frondaisons des arbres avant de balayer la plaine.

Au fil des heures, le ciel bleu commençait à se voiler. Tout d’abord à l’horizon, et de cette gaze blanche naissait d’autres nuages. Des nuages plus haut, plus larges, immenses, avec une forme toute particulière, annonciatrice que les éléments finiraient par se déchaîner. L’air devenait lourd, les oiseaux rasaient le sol. On sentait une agitation, une nervosité sourde. La nature vibrait de pouvoir s’exprimer. De notre côté, nous nous hâtions de ramasser outils, linge car déjà à la lourdeur de l’atmosphère s’ajoutait de petits coups de vent. La caresse du début d’après-midi n’était plus. Tel le héraut marchant au-devant de son roi, le vent élevait la voix. Et les herbes des champs, et la cime des arbres se prosternaient et se redressaient respectueusement à son souffle.

Les nuages noirs découpaient dans le ciel avec une netteté incroyable la forme des arbres et de la maison de la pompe que la lumière jaune du soleil saluait, comme un aurevoir, avant de se retirer. Le monde à cet instant précis ressemblait à une de ces fééries, qu’on ne voit que dans ses souvenirs. Mais les nuages noirs n’absorbaient aucune lumière et de par ce curieux jeu de contraste, j’ai toujours pensé que le paysage n’avait plus de relief, mais semblait collé, comme une illustration dans un livre de contes. Au loin les premiers roulements annonçant la venue de l’orage se faisait entendre. Déjà la température a chuté et le vent se faisait constant et fort annonçant le cortège tonitruant des éléments.  

Plic, plic une goutte, deux gouttes. Et soudain, les gouttelettes se faisaient plus grosses, ce n’étaient plus des gouttelettes mais des cordes, que les nuages gonflés perdaient crevés par les éclairs. La fraîcheur devenait surprenante, la pluie formait de petits ruisseaux, des flaques qui bouillonnaient tandis que l’orage lançait ses traits sur la plaine sombre, illuminant de ses éclairs jusqu’au bout de l’horizon, en explosant d’un tonnerre assourdissant.

Et peu à peu, l’orage s’apaisait et s’éloignait en emportant sa fureur avec lui. Le grand ciel de la plaine, lavé et frais se teintait alors de bleu pastel comme s’il eut rajeunit. Et comme si tout renaissait, la forêt offrait son frais parfum d’après la pluie. Une odeur fraîche, qui sentait la terre et les herbes coupées. Quelques fragrances de champignons des bois, de feuilles mortes épicent délicatement cet air rafraîchi, marbré suivant la brise de mesures plus douces. Une légère buée montait du sol, le soleil revenait peu à peu et séchait doucement la plaine, avec tendresse comme on réveillerai sa fiancée.

4 réponses

  1. Très joli ! On a l’impression d’y être…

  2. Sandy dit :

    Je trouve que c’est une belle description, y’a quelques choses qui me fait penser à du Balsac ou du Hugo avec une touche bien personnelle…
    Tu devrais en faire un bouquin avec quelques péripéties aventureuses..

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